CE QUE LE JOUR DOIT A LA NUIT.

Ce que le jour doit à la nuit.L’auteur, Yasmina Khadra est le pseudonyme de Mohammed Moulessehoul. Il n’a révélé son identité masculine qu’en 2001, avec la parution de son roman autobiographique « L’Ecrivain ». Yasmina Khadra sont les prénoms de son épouse.

Il est né le 10 janvier 1955 en Algérie. Ses premiers romans ont été écrits alors qu’il était officier dans l’armée algérienne, d’où le choix d’un pseudonyme. Il quitte l’armée en septembre 2000, fait un séjour au Mexique puis en 2001 s’installe à Aix-en-Provence où il réside encore.

Son oeuvre est abondante, plus de vingt romans, traduits dans trente-sept pays. « Les hirondelles de Kaboul » raconte l’histoire de deux couples afghans sous le régime des Talibans. « L’Attentat » est l’histoire d’un médecin arabe, Amine, intégré en Israël, qui recherche la vérité sur sa femme kamikaze. « Les Sirènes de Bagdad » relate le désarroi d’un jeune bédouin irakien poussé à bout par l’accumulation de bavures commises par les troupes américaines. Ce livre, publié en 2005, a obtenu le Prix des Libraires.

CE  QUE  LE  JOUR  DOIT  A  LA  NUIT.

Le récit se déroule dans l’Algérie coloniale de 1936 à 1962. Le héros du livre, Younes, n’a que sept ans quand son père, son champ incendié, est obligé d’abandonner ses terres pour s’installer dans un quartier pauvre d’Oran, Jeanane Jato. Son père, malgré son courage, ne réussira pas à surmonter la misère. C’est la mort dans l’âme, qu’il acceptera de confier son fils, à son frère Mahi, pharmacien marié à une chrétienne, Germaine, qui ne cessera jamais de l’aimer comme son fils. Younes devient Jonas,  étudie à Oran, où il est confronté au racisme anti-arabe.  

Son oncle Mahi est arrêté parce qu’il est suspecté d’épouser la cause des nationalistes. « Mon oncle fut relâché après une semaine de détention. Il dut attendre la nuit pour rentrer à la maison. En rasant les murs. Les joues affaissées et le regard morne. Quelques jours de geôle avaient suffi à le transformer de fond en comble. Il était méconnaissable. Une barbe naissante accentuait le froissement de ses traits et ajoutait à son air perdu une touche spectrale. A croire qu’on l’avait affamé et empêché de dormir jour et nuit. »

Mahi décide de déménager à Rio Salado, une petite ville où Jonas va grandir, se faire des amis, pour la plupart français, de la même classe sociale que lui, et connaître l’amour. Il prend conscience de l’exploitation des algériens pauvres à travers le personnage de Jelloul, factotum et souffre-douleur de son ami André mais il s’en accommode sans trop de peine. Son oncle, lui, ne sera jamais plus le même. Il réagira seulement pendant la guerre en apprenant la présence des Américains : « Je vais dans ma chambre. Quand ils seront là, dites-leur que je ne veux pas les voir et qu’ils peuvent mettre le feu à la maison. »

Les années passent, Jonas devient pharmacien, amoureux d’Emilie, qu’il repousse par loyauté envers ses amis. Une suite de malentendus sera à l’origine de la dislocation de ses amitiés qu’il croyait indissolubles : « les doigts de la fourche ».

En 1959, un soir, Jelloul, qui fait partie du Front de Libération nationale, débarque chez lui, avec son chef qui a reçu une balle dans la poitrine au cours d’un accrochage avec les gendarmes. Il veut forcer Jonas à l’opérer : « S’il meurt, c’est toi qui l’accompagneras dans l’autre monde, me menaça-t-il calmement. Cet homme compte plus que ma propre vie. » C’est Germaine qui, pour épargner Jonas, l’opérera et l’hébergera jusqu’à ce qu’il soit guéri. Jonas sera forcé de livrer des médicaments au Front de Libération nationale. Malgré les pressions de Jelloul, les injures : « Tu veux que je te dise, Jonas ? Tu me fends le coeur. Il faut être un moins-que-rien pour passer à côté d’un destin majeur », Jonas n’arrivera pas à redevenir Younes.

 Il justifiera son attitude dans une scène d’affrontement avec Jelloul : « Je ne suis pas un lâche, Jelloul. Je ne suis pas sourd, ni aveugle, et je ne suis pas fait de béton. Si tu veux savoir, rien sur cette terre  ne m’emballe, désormais. Pas même le fusil qui autorise celui qui le porte à traiter les gens avec mépris. N’est-ce pas l’humiliation qui t’a contraint à porter les armes ? Pourquoi l’exerces-tu à ton tour, aujourd’hui ? »

 Le roman donne l’impression que Yasmina Kadra a volontairement gommé tout ce qui a fait l’horreur de la guerre d’Algérie. Younes est un personnage contradictoire. Il n’a pas oublié son enfance, ses parents disparus, victimes de la misère. Mais, son intégration dans la bourgeoisie algérienne, l’amour que lui voue sa tante Germaine, les amitiés nouées pendant ses études, semblent peser sur lui plus que ses origines.

 Je n’ai lu aucun autre livre de Yasmina Kadra. Les critiques le présentent comme un grand écrivain, qui prône la tolérance, critique la bêtise humaine et la culture de la violence. Il a d’ailleurs dit ne pas aimer ce que son pays était devenu.

 Yasmina Kadra écrit bien mais j’ai trouvé beaucoup de longueurs dans « Ce que le jour doit à la nuit ». Que l’amour qu’éprouve Younes pour Emilie soit le principal ressort du roman met un peu mal à l’aise car l’époque est tragique et  j’ai éprouvé des difficultés à comprendre que le personnage principal s’intéresse aussi peu à ce qui se passe dans son pays.

 Ce roman publié en 2008 a eu le Prix Roman France Télévision.

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